Sophie a failli renoncer à son projet immobilier, un rêve qu’elle chérissait depuis longtemps. Atteinte d’une maladie auto-immune, elle s’est vu refuser l’assurance prêt par plusieurs banques, une situation décourageante et injuste. Son histoire met en lumière une réalité que vivent de nombreuses personnes confrontées à des problèmes de santé : l’accès à la propriété peut se révéler un parcours semé d’embûches. L’assurance emprunteur, pilier de la sécurité financière tant pour l’emprunteur que pour l’établissement prêteur, devient parfois un obstacle insurmontable pour ceux considérés comme présentant un risque aggravé.

Maladie chronique, antécédents médicaux complexes… Ces défis sont-ils réellement des barrières infranchissables pour décrocher un prêt immobilier ? L’assurance emprunteur, véritable bouclier de protection, garantit le remboursement du capital restant dû en cas d’événements imprévus tels que le décès, l’invalidité ou l’incapacité. Un « risque aggravé de santé » est défini par les assureurs comme un état de santé impliquant une probabilité accrue de survenue d’un sinistre couvert par la police d’assurance. Nous aborderons notamment la Convention AERAS, la délégation d’assurance et d’autres stratégies pour vous aider à obtenir votre prêt.

Comprendre les enjeux de l’assurance emprunteur et le risque aggravé

Avant de détailler les solutions, il est essentiel de bien cerner le fonctionnement de l’assurance emprunteur et les raisons pour lesquelles un risque aggravé de santé peut complexifier l’accès au crédit. Cette compréhension est cruciale pour aborder ce domaine avec les connaissances nécessaires.

Fonctionnement de l’assurance emprunteur : un rappel essentiel

L’assurance de prêt, souvent exigée par les banques, offre diverses garanties destinées à protéger à la fois l’emprunteur et l’établissement financier. Les couvertures de base incluent le décès, la Perte Totale et Irréversible d’Autonomie (PTIA), l’Incapacité Temporaire Totale (ITT), l’Invalidité Permanente Totale (IPT) et, dans certains cas, la perte d’emploi. La quotité représente la part du capital emprunté couverte par l’assurance pour chaque emprunteur, allant de 100% pour une personne seule à une répartition variable au sein d’un couple. Le questionnaire de santé est l’outil principal permettant à l’assureur d’évaluer le profil médical de l’emprunteur. La sincérité et l’exhaustivité des réponses fournies sont primordiales.

Pourquoi le risque aggravé pose-t-il problème ?

Les compagnies d’assurance analysent le niveau de risque en se basant sur la probabilité que les garanties soient mises en œuvre. Un risque aggravé de santé est considéré comme augmentant cette probabilité, ce qui peut entraîner un refus d’assurance, une surprime appliquée au tarif de base, ou encore des exclusions de garanties. L’évaluation s’appuie sur des données statistiques et les informations renseignées dans le questionnaire de santé. Pour l’emprunteur, cela peut se traduire par des difficultés à obtenir un prêt immobilier, des coûts d’assurance plus élevés et une protection potentiellement moins étendue.

Décryptage des termes spécifiques

La maîtrise du vocabulaire spécifique à l’assurance emprunteur est indispensable pour une bonne compréhension du sujet. La surprime est un montant additionnel ajouté à la cotisation d’assurance en raison d’un risque de santé plus élevé. Elle est exprimée en pourcentage du capital emprunté. Par exemple, une surprime de 0,5% se traduit par un coût supplémentaire de 500€ par tranche de 100 000€ empruntés. L’exclusion de garantie signifie qu’une condition médicale ou un événement spécifique n’est pas couvert par le contrat d’assurance. Le questionnaire de santé simplifié, ou déclaration de santé, est une version abrégée du questionnaire standard, proposée dans certaines situations pour limiter les questions intrusives.

L’évolution de la législation : un contexte en mouvement

Le cadre légal de l’assurance emprunteur a connu d’importantes modifications ces dernières années. Les lois Lagarde ( Loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 ), Hamon ( Loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 ) et Bourquin ont successivement introduit la possibilité de choisir son assurance (délégation) et de changer d’assurance chaque année. La loi Lemoine ( Loi n° 2022-270 du 28 février 2022 ), en particulier, représente une avancée significative en supprimant le questionnaire de santé pour les prêts inférieurs à 200 000€ par assuré et dont l’échéance intervient avant le 60ème anniversaire de l’emprunteur. Cette mesure facilite grandement l’accès à l’assurance pour un grand nombre d’emprunteurs ayant des antécédents médicaux. Il est donc primordial de se tenir informé des évolutions législatives pour faire valoir ses droits et bénéficier des conditions d’assurance les plus avantageuses.

Solutions existantes pour s’assurer malgré un risque aggravé

Fort heureusement, plusieurs options permettent d’obtenir une assurance emprunteur malgré la présence d’un risque aggravé de santé. Il est important de les connaître et de les examiner attentivement afin de déterminer la solution la plus adaptée à votre situation personnelle.

La convention AERAS (S’Assurer et emprunter avec un risque aggravé de santé) : le filet de sécurité

La Convention AERAS est un dispositif conventionnel mis en place pour faciliter l’accès à l’assurance emprunteur aux personnes présentant des problèmes de santé importants. Elle a pour but d’étudier les dossiers jugés complexes et de proposer une solution d’assurance, même si le risque est élevé. Le processus AERAS comprend différentes étapes : une première analyse par la banque, puis un passage au « pool des risques », un regroupement d’assureurs, et enfin, si possible, une proposition d’assurance. La Convention AERAS couvre de nombreuses pathologies, comme le cancer, le diabète, les maladies cardiovasculaires et certaines affections psychiatriques. Si elle constitue un filet de sécurité essentiel, elle peut néanmoins entraîner des délais de traitement plus longs, l’application de surprimes et des exclusions de garanties.

La délégation d’assurance : une solution à explorer

La délégation d’assurance consiste à souscrire une assurance auprès d’un organisme différent de celui proposé par la banque prêteuse. Cette alternative offre souvent la possibilité de bénéficier de tarifs plus compétitifs et de garanties plus adaptées à votre profil spécifique. Pour trouver une assurance alternative, vous pouvez utiliser des comparateurs en ligne, qui permettent de comparer les offres de différents assureurs, ou faire appel à un courtier spécialisé. Il est crucial de comparer attentivement les devis et de bien lire les conditions générales avant de prendre votre décision.

L’assurance groupe de la banque : un point de comparaison indispensable

L’assurance groupe proposée par la banque présente l’avantage d’être facile à souscrire, étant directement intégrée à l’offre de prêt. Elle repose sur une mutualisation des risques entre tous les emprunteurs, ce qui peut s’avérer avantageux pour les profils ne présentant pas de risque particulier. Cependant, pour les personnes considérées comme présentant un risque aggravé, les tarifs peuvent être plus élevés et les garanties moins adaptées qu’avec une délégation d’assurance. Il est donc primordial de comparer l’offre de la banque avec d’autres solutions disponibles sur le marché.

Les assurances spécialisées : une niche à ne pas négliger

Certaines compagnies d’assurance se sont spécialisées dans la couverture des personnes présentant des risques de santé plus importants. Elles possèdent une connaissance approfondie de ces problématiques et proposent des garanties spécifiquement adaptées aux pathologies concernées. Si ces assurances peuvent être plus onéreuses que les assurances classiques, elles offrent une meilleure couverture et une plus grande tranquillité d’esprit. Pour identifier ces assureurs, vous pouvez consulter des annuaires spécialisés, solliciter des recommandations auprès de votre médecin traitant ou vous rapprocher d’associations de patients. Par exemple, APRIL Mon Assurance Prêt et AFI Europe proposent des solutions pour les personnes ayant des antécédents médicaux.

Le cautionnement : une alternative à l’assurance emprunteur ?

Le cautionnement est une alternative à l’assurance emprunteur, dans laquelle un organisme de caution se porte garant pour l’emprunteur auprès de la banque. Cette solution peut être intéressante pour les personnes ayant des difficultés à s’assurer en raison de leur état de santé, car elle implique généralement un questionnaire de santé moins détaillé. Néanmoins, le cautionnement est basé sur la solvabilité de l’emprunteur et peut s’avérer plus coûteux à long terme que l’assurance emprunteur traditionnelle. Il est donc important d’évaluer attentivement les avantages et les inconvénients de cette option avant de prendre une décision.

L’apport personnel : un atout majeur

Un apport personnel conséquent peut significativement réduire le niveau de risque perçu par l’assureur. En effet, un apport initial important diminue le montant du prêt à assurer, ce qui réduit mécaniquement le risque financier pour la compagnie d’assurance. Un apport de 20% ou plus du prix du bien peut faciliter l’accès à l’assurance et potentiellement abaisser le montant des surprimes. Il est donc conseillé de mettre en place une stratégie d’épargne en amont de votre projet immobilier afin de constituer un apport personnel solide.

Conseils pratiques pour optimiser ses chances d’obtenir une assurance prêt

Même en présence d’un risque aggravé de santé, il est possible d’optimiser vos chances d’obtenir une assurance de prêt en suivant certains conseils simples mais efficaces.

Préparer son dossier médical avec soin

Un dossier médical complet et bien structuré est essentiel pour faciliter l’évaluation de votre profil par l’assureur. Rassemblez tous les documents médicaux pertinents, tels que les bilans, les comptes rendus d’hospitalisation, les résultats d’examens et les informations sur vos traitements. Sollicitez auprès de votre médecin traitant un certificat médical détaillé décrivant précisément votre pathologie, son évolution, et son pronostic. Anticipez les questions du questionnaire de santé en préparant des réponses claires, précises, et honnêtes.

Être transparent et honnête dans ses déclarations

Il est impératif de ne dissimuler aucune information concernant votre état de santé à l’assureur. Une fausse déclaration, même involontaire, peut entraîner la nullité du contrat d’assurance et avoir des conséquences financières désastreuses. Fournissez l’ensemble des détails nécessaires pour permettre une évaluation juste et précise du risque, même si cela peut vous sembler défavorable. La transparence est la base d’une relation de confiance avec votre assureur.

Se faire accompagner par un courtier en assurance spécialisé

Un courtier spécialisé dans les risques aggravés de santé peut vous apporter une assistance précieuse. Fort de son expertise du marché, il connaît les assureurs les plus susceptibles de proposer des solutions adaptées à votre situation. Il peut également négocier les conditions de votre assurance et vous accompagner dans toutes les démarches administratives. Pour bien choisir votre courtier, demandez des recommandations, consultez des comparateurs en ligne et renseignez-vous sur ses honoraires.

Ne pas hésiter à faire jouer la concurrence

Il est fondamental de comparer les offres de différents assureurs avant de prendre une décision. Les tarifs et les garanties peuvent varier considérablement d’une compagnie à l’autre. N’hésitez pas à négocier les conditions de votre assurance, en particulier les surprimes et les éventuelles exclusions de garanties. La mise en concurrence des assureurs est un levier efficace pour obtenir la meilleure assurance au prix le plus juste.

Se renseigner sur les aides financières existantes

Certaines associations de patients ou dispositifs spécifiques peuvent vous aider à financer une partie de votre assurance emprunteur. Contactez votre médecin, votre association de patients ou votre courtier pour connaître les aides auxquelles vous pouvez prétendre.

Anticiper et s’y prendre à l’avance

Démarrez les démarches liées à l’assurance le plus tôt possible, idéalement avant de signer le compromis de vente. Prévoyez un délai de traitement par les assureurs, notamment dans le cadre de la Convention AERAS, qui peut prendre plusieurs semaines. En anticipant, vous éviterez le stress et la précipitation, et vous disposerez de plus de temps pour examiner les offres et négocier les conditions.

Focus sur certaines pathologies spécifiques

Voici quelques exemples de pathologies courantes et les solutions d’assurance qui peuvent être envisagées. Il est important de souligner que chaque situation est unique et nécessite une analyse personnalisée.

Le cancer

Les avancées médicales considérables ont permis d’améliorer significativement le pronostic de nombreux cancers, ce qui a un impact positif sur les conditions d’assurance. Après une période de rémission, il est souvent possible de contracter une assurance emprunteur, parfois avec des surprimes. Certains assureurs proposent des garanties spécifiques pour le cancer, incluant notamment la couverture des rechutes.

Le diabète

Un suivi médical rigoureux et un bon équilibre glycémique sont essentiels pour obtenir une assurance de prêt en cas de diabète. Le montant des surprimes potentielles dépendra du type de diabète (type 1 ou type 2), de son ancienneté, et de la présence éventuelle de complications. Certains assureurs offrent des tarifs plus avantageux aux personnes diabétiques respectant scrupuleusement leur traitement et leurs rendez-vous médicaux. La Fédération Française des Diabétiques peut vous fournir des informations et des conseils.

Les maladies cardiaques

Les facteurs de risque cardiovasculaires et les mesures de prévention mises en œuvre jouent un rôle déterminant dans l’évaluation du risque. Les assureurs peuvent demander des examens médicaux complémentaires pour apprécier l’état de santé de l’emprunteur. Les conditions d’assurance après une intervention chirurgicale dépendront du type d’intervention réalisée et de l’évolution de la pathologie.

Réussir son projet malgré un risque aggravé

Contracter une assurance emprunteur en présence d’un risque aggravé de santé peut sembler complexe et décourageant. Il est cependant essentiel de garder à l’esprit qu’il existe des solutions et qu’il est tout à fait possible de mener à bien votre projet immobilier. La législation a évolué favorablement pour faciliter l’accès à l’assurance, et les assureurs sont de plus en plus sensibilisés aux enjeux liés à la santé. L’essentiel est de se faire accompagner par des professionnels compétents, de comparer attentivement les offres, et de ne pas hésiter à faire valoir vos droits.

N’oubliez pas que chaque situation est unique et qu’une solution personnalisée peut être trouvée. Avec de la patience, de la détermination et les bons conseils, vous pouvez surmonter les obstacles et réaliser votre rêve de devenir propriétaire.